• Les Échos / 22 octobre 2020
Les trois quarts des 20 millions d’actifs du secteur privé qui ne l’ont pas encore fait vont peut-être disposer d’un répit pour récupérer dans leur compte personnel de formation, en espèces sonnantes et trébuchantes, les heures non utilisées au titre du droit individuel à la formation (DIF), le dispositif précédent. La ministre du Travail, Elisabeth Borne, vient en effet de demander à ses services d’étudier la possibilité de repousser la date butoir du 31 décembre 2020.
« Nous allons en outre relancer une campagne de communication, en collaboration avec la Caisse des dépôts, pour rappeler la date de clôture aux salariés et les inciter à basculer leurs droits. Mais nous allons davantage mobiliser les entreprises pour qu’elles sensibilisent les salariés au sujet », a-t-elle annoncé à La Croix sans préciser de quelle durée pourrait être ce répit.
Un salarié sur six passé à l’action
Un sondage réalisé par Ipsos pour le compte de l’organisme Wall Street English montre qu’un salarié sur six seulement est passé à l’action. À la clef, il y a pourtant jusqu’à 1 800 euros à récupérer d’un coup ! Pour rappel, le DIF a été créé en 2004, alimenté à raison de 20 heures par an et plafonné à 120 heures, financées par la cotisation formation des entreprises. Dix ans plus tard, il a laissé la place au CPF, avec possibilité de récupérer les heures DIF non utilisées. Le tout a été converti en euros à raison de 15 euros l’heure le 1er janvier 2019. Depuis chaque titulaire reçoit 500 euros par an (800 pour les moins qualifiés).
Formation professionnelle : la bombe à retardement du CPF
Initialement, la loi « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » de 2018 avait fixé au 31 décembre 2020 la date limite pour consommer le reliquat DIF. Cette échéance a été maintenue, mais juste pour le transférer dans son CPF, les euros correspondants étant disponibles sans limite de temps. Encore faut-il que chaque titulaire d’un CPF soit informé, ce qui est loin d’être le cas : près de six salariés sur dix sont dans ce cas, relève le sondage. On compte environ 30 millions de comptes avec au moins 1 euro.
Ne pas attendre
À la Caisse des dépôts, qui gère le CPF, on avance qu’un titulaire sur quatre, soit environ 5 millions si l’on ne prend pas en compte les agents publics et les retraités, a renseigné son reliquat d’heures DIF qui, une fois converti, a donné un crédit de 1 257 euros en moyenne. Ils devraient être entre 6,5 et 7 millions à la fin de l’année. Sur le seul champ du privé, il resterait donc au moins une dizaine de millions de titulaires de CPF qui ne seront pas passés à l’acte fin décembre. Sur cette base, et si l’on reprend la moyenne de 1 257 euros, pas moins de 12,5 milliards n’auraient pas à être provisionnés par le système de formation professionnelle si on en restait là.
Ce chiffre est à prendre avec prudence. La loi a de toute façon plafonné le CPF à 5 000 euros, DIF inclus (8 000 euros pour les personnes peu qualifiées). En clair, inscrire son reliquat permet d’atteindre le plafond plus rapidement.
Ce chiffre est à prendre avec prudence. La loi a de toute façon plafonné le CPF à 5 000 euros, DIF inclus (8 000 euros pour les personnes peu qualifiées)
Oublier de le faire oblige seulement à patienter quelques années de plus pour disposer pleinement de ce droit individuel à la formation. Si la crise s’enlise, les salariés ont tout intérêt à choisir la première option pour disposer plus rapidement d’un pouvoir d’achat de formation plus élevé. « C’est en temps de crise qu’il faut se former et renforcer son employabilité », confirme Elisabeth Borne.
À NOTER
• Pour inscrire son reliquat d’heures de DIF dans son CPF, il faut récupérer l’information sur son bulletin de salaire de décembre 2014 ou de janvier 2015, ou à défaut demander une attestation de son employeur d’alors, puis numériser le document dans l’application mobile ou sur le site Web. ///